Apocalypse selon Saint Niels
Aymeric Avice / Pomme de Terre
"D’emblée, la voix soufflée d’Aymeric Avice évoque des réminiscences de free-bop, son phrasé, tandis que les guitares et la batterie développent une texture complexe, davantage rock-noise pour les amateurs de tiroirs ; mais justement ce qu’on entend, son intention, échappe aux amateurs d’enfermement, de classement. Ici, personne ne range sa chambre, les mémoires s’empilent aux quatre coins et chacun tape dedans.
Ce quartet sans basse n’en manque pas : il y a toujours un guitariste pour dialoguer avec la batterie ; la grosse caisse, le tom basse tiennent le registre mais personne ne fait les comptes. Ainsi, l’orchestre ne manque ni de grave, ni d’air.
Au-delà d’un certain vrombissement désiré et irrésistible, l’improvisation totale et maitrisée de l’ensemble fait son œuvre mais une certaine forme se dessine pourtant, reposant surtout sur la confiance mutuelle indestructible des quatre protagonistes de ce chantier à ciel ouvert. Si parfois la trompette se bouche, l’horizon lui s’entrouvre, laissant filtrer des traits de lumière zèbrés, car au loin mais tout près aussi, le souci d’une certaine forme occupe chacun sur son terrain, comme une sorte d’aura ectoplasmique s’échappant de ce corps unique à quatre côtés qui ne cesse de bousculer les formes.
Les huit chapitres de cette « Apocalypse selon Saint Niels », titre mystérieux prêtant sans doute au guitariste Niels Mestre une intention qu’il n’avait pas, nous dit encore de la verve iconoclaste de ce groupe décidément pas comme les autres.
Tellurique est le mot qui me vient, pour finir.
Quant à l’origine du nom du groupe, il vient du nom du batteur : Ziemniak veut dire « pomme de terre » en polonais et Aymeric s’émerveille de l’existence même des pommes de terre.
Voilà, nous y sommes."
Philippe Ochem, Jazzdor
DANS LES BACS LE 26 MAI 2023